Avec sa nouvelle Rega P10 montée avec la cellule MC Apheta 3, le plus important fabricant britannique de platines vinyle se hisse encore un peu plus haut dans le firmament audiophile.
La Rega P10 représente désormais le sommet de la gamme de platines vinyle de Rega. La nouvelle P10 n’est pas une révision plus ou moins améliorée du précédent porte-drapeau de la marque, le modèle RP10. Il s’agit carrément d’un tout nouveau design, montrant une fois de plus, s’il était nécessaire, que Rega fait partie de cette poignée de fabricants qui donnent le ton et auxquels on se réfère. Il n’y a pas longtemps, la découverte de la platine vinyle Rega P8 a suscité mon enthousiasme. Il n’en fallait pas plus pour exciter ma curiosité et découvrir ce qu’offre de plus la nouvelle P10.
Masse & rigidité
Avec la nouvelle P10, le paradoxe Rega perdure : le fabricant a toujours privilégié une construction caractérisée par une masse la plus faible possible. Cela va totalement à l’encontre des idées reçues dans le domaine des platines haut de gamme où il n’est pas rare de trouver des pièces monstrueuses nécessitant une grue pour les déplacer… Cela se remarque par le design minimaliste de la P10, avec son socle réduit à sa plus simple expression. Un squelette de socle en somme, d’où l’appellation « Skeletal ». Au contraire de la masse, la rigidité est poussée à son maximum. La construction consiste en deux plaques de stratifié haute pression, ultra rigides, prenant en sandwich un panneau de mousse polyuréthane Tancast 8. L’ensemble est encore rigidifié par deux points de renfort.
‘Il s’agit carrément d’un nouveau design, montrant une fois de plus que Rega fait partie de cette poignée de fabricants qui donnent le ton’
Rega Naiad
Cette construction en sandwich, également utilisée pour la P8, est inspirée par la somptueuse Rega Naiad. Cette platine extraterrestre développée par Rega pour fêter les 40 ans de la firme en 2013, est devenue une icône de la haute-fidélité. Avec ses matériaux exotiques soigneusement sélectionnés pour réduire l’encombrement et augmenter la rigidité, la nouvelle Rega P10 peut se permettre de tutoyer la sublime Naiad.
Moteur
Le moteur de la Rega Planar est le dernier modèle synchrone 24 V à faibles vibrations développé par les ingénieurs de la firme. La suspension de ce moteur et sa technique de montage ont été directement inspirées de la Naiad. Cette méthode de montage supprime toute contrainte sur le boîtier du moteur et maintient la poulie d’entraînement parfaitement immobile. Cela garantit une vitesse de rotation stable et précise afin que la nouvelle double courroie EBLT soit entraînée de manière optimale.
P10 PSU
Qui dit alimentation moteur dit risques de vibrations et de rayonnements électromagnétiques. Pas de cela avec Rega. C’est pourquoi l’alimentation est fournie par un bloc entièrement séparé, le Rega P10 PSU. Cette alimentation externe correspond parfaitement à la philosophie qu’a adoptée Rega pour ses derniers modèles. Elle détermine la vitesse de rotation de la P10 avec la plus grande précision possible. Le passage de 33 à 45 tr / min se fait avec deux boutons à l’avant du bloc d’alimentation. Chaque P10 et son bloc d’alimentation PSU dédié sont ajustés manuellement en usine pour former un couple harmonieux.
Plateau céramique
La Rega P10 utilise un plateau en céramique, à effet volant grâce à une masse supérieure en périphérie. Ce plateau est fait d’une poudre de céramique de couleur blanc neige qui est compressée et cuite à très haute température. Il est usiné au diamant pour assurer une surface parfaitement lisse et uniforme. La construction sophistiquée du plateau lui permet de s’adapter parfaitement au sous plateau, sans aucun risque de jeu. Rega a prévu un couvre plateau en feutre, et certains peuvent trouver cela dommage : du plus banal effet. Reste que, esthétiquement, le plateau avec sa belle couleur attire le regard, et se démarque du plateau en verre de la P8, lui aussi très joli par ailleurs.
Bras RB3000
La Rega P10 est livrée en standard avec le nouveau bras Rega RB3000. On aimerait plus souvent rencontrer ce genre de « standard ». Le RB3000 est en effet une merveille de technologie de précision avec son tube d’aluminium parfaitement poli main, avec roulements et pivots réduits au minimum pour éviter des phénomènes de friction et usinés au micron près. La conception du bras a en effet été pensée pour avoir le moins de connexions mécaniques possible, et d’ailleurs aucun système adhésif n’est utilisé pour le montage. Lorsque vous prenez le bras en main, vous avez une sensation d’équilibre parfait avec mouvements en trois dimensions.
Cellule Apheta 3 MC
Un autre montage en standard que l’on voudrait rencontrer plus souvent : la Rega peut être fournie avec une toute nouvelle cellule à bobines mobiles, le modèle Apheta 3, conçue pour s’accoupler parfaitement avec le bras RB-3000. C’est une option recommandée, car le montage en usine d’une excellente cellule garantit au mélomane le meilleur réglage possible et évite à celui-ci de passer par des étapes parfois fastidieuses, et de toute façon plus coûteuses. La cellule Apheta 3 MC est équipée de la pointe diamant la plus avancée de Rega avec un profil “Fine Line” et le corps est fabriqué en aluminium usiné d’une seule pièce, selon un processus industriel très précis et délicat. La chasse à la moindre vibration parasite est menée jusque dans les moindres détails, faisant de la Rega Apheta 3 une cellule de référence.
Capot de protection
La Rega P10 est soigneusement recouverte d’une plaque en plexi transparent qui protège le plateau et le bras avec sa cellule. Ce n’est pas à proprement parler un capot, mais plutôt une protection efficace épousant élégamment les contours de la platine.
‘Quiconque prétend qu’un LP ne peut jamais sonner aussi bien que du streaming HR, devrait pouvoir assister à cette démo’
À l’écoute
La technologie, c’est beau. Le plaisir musical permis par la technologie, c’est encore plus beau. J’ai la chance de posséder dans ma collection quelques perles, et parmi celles-ci des références pour la démo comme le ‘Burmester Selection Vol.1’, en qualité 180g, Audiophile pressing, Direct Metal Mastering en 45 tours. Ce qui se fait de mieux techniquement. C’est une compilation judicieuse de morceaux de musique soigneusement sélectionnés produite en collaboration avec In-akustik et Pauler Acoustics. Un double album particulièrement varié avec de la musique de Scarlatti, Rossini, Nils Lofgren, Kari Bremnes, Thans Theessink, Allan Taylor, Al Di Meola, Amber Rubarth, Mckinley Black et Ella Fitzgerald avec Louis Armstrong. Du beau monde ! La qualité d’enregistrement de ces deux disques est sublime. Le challenge est maintenant de savoir si la Rega P10 reproduit le sublime de manière sublime…
Commençons avec Al Di Meola, le magicien de la guitare, avec le morceau “And I love her”. Le jeu de guitare reproduit par la Rega est si incroyablement fidèle et le son naturel est si présent que, et je sais que cette phrase a été écrite des centaines et des centaines de fois à propos de tout et de n’importe quoi, – mais je n’en ai pas d’autre pour exprimer ce que j’ai ressenti : j’avais vraiment l’impression que le génial musicien était physiquement là, devant moi, spécialement venu dans mon salon pour mon plus grand plaisir.
Ella & Louis
Amber Rubarth présente une interprétation acoustique de “Full Moon in Paris” avec sa voix délicate et limpide accompagnée de violon et d’une sobre percussion, et c’est d’une beauté ravissante. Le P10 laisse couler chaque détail, plaçant la voix et les instruments exactement à leur place. Le raffinement dans toute sa délicatesse.
Ella Fitzgerald et Louis Armstrong ont formé un duo mythique et éternel dans nos cœurs. Le morceau “Can’t we be friends” exige énormément de précision et d’équilibre pour sa lecture. Les voix d’Ella et de Louis sont soutenues par une section basse très profonde qui souvent provoque un effet de masque disgracieux, lorsque le système de lecture présente des colorations parasites. Ce n’est absolument pas le cas avec la P10 qui vous fait froncer les sourcils en vous laissant apparaître combien cet enregistrement, malgré son âge, se révèle bien supérieur à quantité de « daubes » que l’on ose commettre aujourd’hui.
Taylor & Theessink
Allan Taylor ; c’est un peu la nostalgie des chanteurs accompagnés d’un grand orchestre comme on les aime. Avec “Chimes at midnight”, les nappes de cordes s’étalent devant moi, m’invitant à les rejoindre dans un décor sonore panoramique.
La voix et les intonations typiques de Geoffrey Oryema nous emmènent dans un autre monde, que la P10 reproduit avec respect et la plus grande modestie.
L’envoûtement de la musique d’Oryema se dissipe et j’en arrive à tout autre chose, plus bluesy, le morceau “Got to keep moving” de Hans Theessink & Terry Evans. Le travail à la guitare des hommes et leurs voix rauques, les drums répétitifs et le rythme entraînant sont reproduits par la P10 avec un sens absolu de la réalité. La Rega P10 n’ajoute rien et ne laisse rien de côté.
Lofgren & Bremnes
‘Malheureusement, j’ai trop écouté “Keith Don’t go” de Nils Lofgren, et j’avais peur que ce morceau ne me sorte par les oreilles… mais la P10 m’a fait découvrir que je pouvais une fois encore l’écouter avec plaisir.
“Spor” (version 2015) de Kari Bremnes me cloue dans mon fauteuil. La P10 ne produit pas du gros son, ce n’est pas une platine DJ. Par contre, elle reproduit la vraie dynamique, bien charpentée et superbement articulée dans son ampleur. J’ai vraiment l’impression d’écouter cette version en streaming High Res. Quiconque prétend qu’un LP ne peut jamais sonner aussi bien que le streaming audio haute résolution devrait pouvoir assister à cette démo.
Rossini
La frivole “Sonate No. 2 en la majeur – I. Allegro” que le (très) jeune Gioachino Rossini a composé à 12 ans clôt ce beau double album avec un feu d’artifice musical. Les cordes s’entrechoquent et se surpassent et les notes voltigent en s’éclatant dans un espace tout de sensualité à l’italienne. Du gâteau pour la P10, et elle n’est pas la seule à se pourlécher les doigts !
Stonehenge
Un autre album spécial qui m’a déjà donné beaucoup de plaisir musical est ‘Stonehenge, the story so far – May 1999’ édité par Hatfield’s End ou plus précisément par Paul Hattink, le charismatique importateur d’Accuphase, musicien, fondateur de la radio internet Hi Online en qualité CD, et du label Hatfield’s End. Les aboiements dans le morceau “Lost in the Sarsen Stone Circle” harcèlent tant et si bien mes chiens que je dois éloigner ceux-ci de peur qu’ils ne s’en prennent à mes enceintes ! Cet album fantastique combinant guitare classique et musique électronique que Paul Hattink a réalisé lui-même est lu par le P10 de telle manière que je vois Paul assis devant moi avec sa guitare. Avec cet album magnifiquement pressé, la P10 montre qu’elle peut se jouer de toute difficulté.
‘Un sans faute donc, pour ce qui est désormais la meilleure platine vinyle jamais créée par Rega’
Par souci d’impartialité, un critique doit toujours chercher le point faible du matériel qu’il dissèque, partant du postulat qu’aucun produit ne peut être parfait à 100%. Je cherche. Je ne trouve pas. Vous l’aurez deviné, il n’y a rien à redire sur la Rega P10. Ah si ! J’ai trouvé : je dois rendre la platine Rega P10 à son importateur Joenit. Et ça, c’est vraiment un gros défaut !
Un sans faute donc, pour ce qui est désormais la meilleure platine vinyle jamais créée par Rega. En tout cas, celle actuellement disponible, car l’ancienne reine des platines, la Naiad, s’en est allée au Paradis où les anges s’en délectent. La Rega P10 combine un design minimaliste voulu avec une qualité de construction bien pensée et sophistiquée. La musicalité de cette platine est sublime. La P10 rejoint ainsi les zones les plus élevées du firmament audiophile. Il est toujours possible de dépenser plus pour une platine. Personnellement, après que la Rega P10 m’ait aussi bien caressé les oreilles, je ne vois pas pourquoi je le ferais. C’est la seule conclusion que je puisse tirer de ce banc d’essai.
Prix
| Rega P10 avec P10 PSU | 4.499 euro |
| Rega P10 avec P10 PSU + Cellule MC Apheta 3 | 5.599 euro |
| Cellule MC Apheta 3 seule | 1.599 euro |
Rega P10
4499
Pour
- Design
- Qualité de fabrication et finition
- Solutions technologiques
- Musicalité
Contre
- Le tapis en feutre !
