Lorsque le rédacteur en chef d’AudioVideo2day m’a appelé il y a quelques semaines pour me dire «J’ai quelque chose de sympa pour toi», je ne savais pas à quoi m’attendre. Il s’agissait en fait de tester des enceintes de la marque française Focal. Au moment où il m’a demandé mon aide pour décharger les gros cartons, je suis devenu encore plus curieux. Avec un poids de 31 kg chacune (emballage compris), ce ne sont pas les enceintes les plus lourdes, mais certainement pas non plus les plus légères du marché.

Une recherche rapide sur internet m’indique que cette enceinte est en vente à 1.399 euros la pièce. Ce n’est donc pas le modèle le plus cher de la gamme. Cela aurait-il une incidence sur la qualité sonore et sur l’expérience d’écoute? Pour bien terminer le test, j’aurai bien envie de comparer ces Focal en écoute A-B avec une autre marque d’enceintes bien connue.

Design et finition

En déballant les N°3, j’ai été immédiatement surpris par leur taille. Visuellement, ils semblent beaucoup plus grands que leur taille annoncée ne le suggère. Les deux enceintes que j’ai reçues sont en finition Black High Gloss, avec des panneaux latéraux brillants, du simili cuir noir sur les autres panneaux et un piètement en aluminium noir mat. On peut difficilement qualifier le N°3 de summum en matière de style. Il s’agit d’un boîtier rectangulaire (le nom exact est parallélépipède rectangle ou, plus facilement prononçable, «pavé droit») tel qu’il est typique dans cette gamme de prix. Mais la finition ne présente aucun défaut. Rien en tout cas que je puisse voir, pas même sur les panneaux latéraux. Habituellement, seules les enceintes «chères» ont une finition brillante impeccable, mais les panneaux latéraux de ces N°3 sont aussi lisses qu’un miroir. Cela témoigne déjà d’une belle ingénierie de fabrication.

Focal Vestia N°3

La Vestia N°3 est une enceinte colonne bass-reflex 3 voies relativement fine de la marque française Focal. Tout a commencé en 1979 à Saint-Étienne, près de Lyon en France. Le talent de Focal naît dans l’atelier de l’entreprise familiale spécialisée en mécanique de précision. À l’époque, seuls deux hommes travaillaient à la production de haut-parleurs, dont le fondateur Jacques Mahul, qui a donné ses initiales au nom complet de la société, Focal JMlab. Les réalisations de ce passionné de Hifi et fan de Pink Floyd séduiront bientôt les mélomanes et audiophiles du monde entier. Plus tard, avec l’arrivée de Gérard Chrétien, un nom bien connu dans le monde des médias français consacrés au son, la marque devient leader incontesté sur le marché de l’enceinte acoustique fabriquée en France.

Sur le site internet de la marque, je lis que la Vestia N°3 offre d’excellentes performances. Pour appuyer cette affirmation, il est précisé que cette enceinte offre une écoute linéaire et une excellente neutralité dans la lignée du modèle à succès Aria 936. Avec une dynamique impressionnante délivrée par trois haut-parleurs de graves à cône Slatefiber à effet «fibre d’ardoise», elle est annoncée comme pouvant combiner le meilleur du home cinéma et de la Hifi. Les aigus sont quant à eux sublimés par une autre technologie Focal : le tweeter TAM à dôme inversé en forme de «M». Enfin, les pieds inclinés des enceintes fournissent une image sonore (Time Alignment) qui place l’auditeur aux meilleures places du concert. Cette légère inclinaison vers l’arrière procure une immersion encore plus profonde et par là plus d’émotions.

Grâce à un choix de finitions harmonieuses et raffinées – façade effet cuir noir ou blanc, panneaux latéraux noir brillant, bois foncé ou bois clair – ces enceintes s’installent facilement dans n’importe quel intérieur. La  Vestia N°3 est idéale pour les pièces à partir de 25 mètres carrés. Elle peut être combinée au caisson de basses SUB 600P pour un résultat encore plus performant avec des basses plus profondes et plus soutenues.

Quelques chiffres:

Techniquement, la Focal Vestia N°3 est une enceinte colonne trois voies bass-reflex.

Transducteurs 3 x 61/2″ (16,5 cm) woofers à cône Slatefiber
61/2″ (16,5 cm) médium à cône Slatefiber
1″ (25 mm) Al/Mg tweeter Al/Mg à dôme inversé TAM
Sensibilité (2,83V/m) 92 dB
Réponse en fréquence (+/-3dB) 42Hz – 30kHz
Réponse dans l’extrême grave (-6dB) 35Hz
Impédance nominale 8 Ω
Impédance minimale 2,9 Ω
Puissance recommandée de l’amplificateur 40 – 300 Watt
Fréquences de coupure 280 Hz / 3.100 Hz
Dimensions (LxPxH) 25,6 x 37,5 x 112,2 cm
Poids net (avec grille) 26,5 kg
Dimensions du carton d’emballage (LxPxH) 31 x 47,5 x 122 cm
Poids net avec emballage 31 kg

Test d’écoute

Le meilleur moment d’un banc d’essai, c’est quand on branche l’appareil à tester pour découvrir ce qu’il vaut. J’ai connecté les deux Vestia N°3 à un amplificateur Naim Uniti Atom Nova d’une puissance nominale de 80 Watt. Le français Focal est depuis quelque temps déjà partenaire de l’anglais NAIM pour proposer aux mélomanes des systèmes complets associant le meilleur de chaque côté de la Manche. Cette combinaison devrait donc a priori bien fonctionner. Les enceintes sont montées sur un socle en aluminium légèrement incliné vers l’arrière. De ce fait, elles se présentent à l’auditeur selon un léger angle, ce qui profite à l’image sonore globale. Les pointes et les pieds sont inclus, cela va de soi avec cette gamme de produits.

​Et maintenant, musique maestro! Ce qui me frappe dès les premières notes, avec différents types de musique, c’est que les Focal Vestia N°3 produisent un son très neutre. Elles restent en cela fidèles au son original de l’enregistrement. Ce qui me frappe également, c’est que même après avoir écouté avec un volume un peu plus élevé pendant une période plus longue, je ne souffre pas du tout de fatigue auditive. Et pourtant, elles ne sonnent pas faussement douces. Au contraire, elles peuvent se montrer musclées avec de la musique électro et du rock. La musique classique y trouve également tout son sens. Le Naim garde tout sous contrôle. La version remasterisée de ‘Who wants to live forever’ par Freddy Mercury sonne de manière sublime.

Mais ce qui me frappe le plus, c’est la clarté du son produit par ces Vestia N°3. C’est probablement la conséquence logique de la “fibre ardoise” spéciale des haut-parleurs et de leur tweeter à dôme en M que Focal utilise ici. Un mot d’explication:

Le matériau Slatefiber, ou Fibre d’ardoise – exclusif à Focal et fabriqué en France, implique l’utilisation de fibres de carbone recyclées et non tissées, placées en remplissage entre deux couches de polymère thermoplastique. Dans leur quête de perfection, les ingénieurs de la marque française ont choisi d’utiliser des fibres de carbone non tissées et de les disposer dans le même sens pour obtenir encore plus de rigidité, un meilleur amortissement mais aussi plus de légèreté, c’est-à-dire les trois ingrédients pour la recette idéale d’un bon haut-parleur.

Le Tweeter TAM à dôme inversé en forme de ‘M’ est également fabriqué en France dans les ateliers Focal. Ce tweeter est constitué d’une membrane à dôme inversé en alliage aluminium/magnésium et moulé sous la fameuse forme ‘M’ (exclusivité Focal). Ce profil lui confère une plus grande rigidité et réduit les distorsions. Il possède également un angle de diffusion plus grand en produisant des aigus encore plus fins.

Continuons l’écoute avec l’album ‘To All New Arrivals’ de Faithless. La reproduction des basses est bonne, cela ne fait aucun doute.

Pour aller plus loin dans le test des graves, quels meilleurs morceaux que ‘The Hills’ de The Weeknd et ‘Seeya’ de Deadmau5? Une fois de plus, les Vestia N°3 ne déçoivent pas avec des basses d’une grande richesse et beaucoup de profondeur.

La raison en est probablement que les enceintes Vestia disposent de deux évents de décompression pour compenser l’étroitesse du caisson. Ces deux évents judicieusement accordés sont censés augmenter la profondeur de l’image sonore avec des graves plus puissants et bien contrôlés. Et cela s’entend!

Malgré toutes ces prouesses techniques ou plus probablement, justement grâce à cela, les Vesta N°3 parviennent toujours à garder un profil sonore neutre sans jamais caricaturer la réponse des basses. Elles sont à la fois bien présentes et pêchues tout en étant bien tenues.

Avec de la musique acoustique, principalement classique, les Vestia se sentent tout aussi à l’aise. Le violon d’Itzhak Perlman est magnifiquement reproduit, mais il lui manque juste ce supplément d’émotion que l’on devrait un peu plus ressentir. Est-ce le son voulu trop neutre qui est responsable de cette légère sécheresse?

Test d’écoute A-B: Focal Vestia N°3 vs. Bowers & Wilkins 702 S3

Pour en avoir le cœur net, je continue l’écoute en comparaison A-B. Je profite de ce que je possède une paire de Bowers & Wilkins 702 S3. OK, elles coûtent deux fois le prix des Vestia N°3, mais je les connais bien et c’est l’occasion de percevoir la différence entre les deux. J’utilise pour le test ma playlist standard en format FLAC lossless stockée sur mon NAS Synology proposant les morceaux suivants :

  • ‘Sea Wall’ tiré du film ‘Blade Runner 2049’;
  • ‘Annabelle’, la machine sonore fulgurante de Hans Zimmer, dans laquelle la voix et la guitare de Macy Gray vous traversent la peau jusqu’aux os;
  • Jóhann Jóhansson avec le morceau ‘Heptabod B’ tiré de Arrival;
  • The Weeknd met ‘Blinding Lights’;
  • ‘Seeya’ van Deadmau5;
  • Et on finit en beauté avec ‘I’m not a hero’ tiré de la trilogie Batman The Dark Knight.

Comme la plupart des journées d’été ont été pluvieuses, je n’ai pas eu trop de mal à convaincre mon épouse et quelques amis à remplacer le BBQ au jardin par une écoute comparative au salon (suivie d’un bon spaghetti convivial). Le panel d’écoute ainsi constitué était un mélange bien équilibré de personnalités diverses avec des habitudes d’écoute différentes. Le plus intéressant a quand même été de constater que chacun ressentait la même chose, même si c’était à des degrés divers. Il y avait là aussi bien des audiophiles que des gens qui simplement écoutent de la musique sans faire de chichi.  L’impression générale est que les B&W 702 S3 étalent mieux la scène sonore avec une meilleure répartition dans les aigus. Pour les basses, en revanche, on n’entend pas beaucoup de différence. J’en suis venu au test qui tue : l’écoute en aveugle où il fallait deviner quelle paire jouait. En regardant les résultats, tout le monde était bluffé. Nous n’avions raison qu’à 55 %! Cela signifie que les Vestia sonnent «presque» aussi bien que les Bowers & Wilkins avec un investissement bien inférieur.

Comme l’explication tient peut-être au fait que le choix de la playlist contient surtout des musiques spectaculaires, style grosse artillerie, n’autorisant pas beaucoup de subtilité, nous sommes repartis (pendant que la sauce bolo mijotait calmement) vers une sélection plus représentative de ce que la musique dite classique nous offre en matière de richesse:

  • Dans la lignée des «musiques de film» (comme l’a dit un voisin qui disait connaitre ce morceau), le très bel ‘Adagietto’ de la cinquième symphonie de Malher;
  • La neuvième symphonie de Dvořák dite ‘du Nouveau Monde’, dans la célèbre interprétation du Berliner Philharmoniker dirigé par le bel Herbert (von Karajan pour les intimes);
  • La très poignante musique du film ‘Schindler’s List’ avec laquelle le violon d’Itzhak Perlman nous a tous fait pleurer;
  • Le lumineux ‘Clair de Lune’ de Claude Debussy.

Ces morceaux beaucoup plus complexes, dans leur intimité comme dans leur fougue, dévoilent plus de différence entre les deux enceintes. Un test A-B est toujours plus impitoyable qu’un test en solo car l’esprit n’a pas le temps de s’accommoder des éventuels défauts. Outre l’image plus réaliste dans les médiums-aigus, les B&W offrent plus de matière dans les graves. En comparaison, les Vestia N°3 nous laissent un peu sur notre faim. Il ne s’agit pas d’un monde de différence, mais le ressenti à l’écoute et l’émotion musicale nous semblent moins prenantes sur les Focal.

Lorsqu’on écoute le solo de violon d’Itzhak Perlman dans ‘La Liste de Schindler’, les B&W nous donnent la chair de poule et on pleure. Avec les Vestia, on se souvient que l’on peut avoir la chair de poule. Les B&W seraient-elles donc définitivement meilleures que les Focal? Non, la voix et le piano sonnent plus juste avec les Vestia. Les B&W ont tendance à «arrondir» les notes, à en rajouter. Ici, la neutralité des Vestia l’emporte.

Cette fois, lors du test d’écoute à l’aveugle, le score était conforme aux attentes. Nous avions raison à 93 % dans nos évaluations. Mais en toute honnêteté, on compare aussi la Vestia avec une enceinte presque deux fois plus chère! En fait, ce n’est pas comparable, comme les pommes et les poires. Par contre, le test A-B nous a permis d’évaluer ce que l’on pourrait gagner en qualité en doublant l’investissement, ce qui est déjà en soi une expérience intéressante.

Si vous êtes uniquement fan de musique symphonique et de chambre, peut-être la Focal n’est-elle pas tout à fait conforme à vos attentes. Mais comme enceinte «passe-partout», elle impose son rapport qualité-prix grâce à sa grande neutralité.

Conclusion

Avec la Vestia N°3, Focal lance sur le marché d’excellentes enceintes. L’extrême clarté de la reproduction sonore générale et la neutralité de restitution se démarquent particulièrement. Bien plus, sa tenue et sa pureté à fort volume sont une expérience absolument positive. Peu d’enceintes dans cette gamme de prix s’en rapprochent. Félicitations Focal!

Mon opinion personnelle est bien sûr… personnelle, et conditionnée par mes habitudes d’écoute au quotidien. Je pense que ces Vestias excellent surtout dans le meilleur rock et dans la musique électronique bien mixée, en offrant juste ce qu’il faut d’émotion à l’écoute de musique purement acoustique. L’expérience «live» à des volumes plus élevés est tout simplement fantastique. Pour le reste, le bon contrôle des basses et le bon timing se démarquent. Dans tous les cas, pour 2.798 euros, vous obtenez un joli ensemble d’enceintes dont vous profiterez pendant de nombreuses années. Je ne puis que vous conseiller d’aller les découvrir chez un revendeur de la marque.

Focal Vestia N°3

1.399,- euros la pièce
8.6

Prestations

8.9/10

Fonctionnalité

9.5/10

Qualité de fabrication

8.1/10

Design

7.1/10

Prix / Qualité

9.5/10

Pour

  • Neutralité de la restitution
  • Clarté du son pour tous les genres musicaux
  • Amateur de volume qui fait trembler les murs, cette enceinte est pour vous
  • Se distingue dans la restitution des concerts live rock et électro
  • Belle fabrication ‘made in France’

Contre

  • L’amateur de musique classique reste un peu sur sa faim
  • Le design est commun
  • Pas de possibilité de bi-câblage ni de bi-amplification (normal dans sa classe de prix)
Points de vente de la marque focal